Journal d’un corps. Ça alors.

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Journal d’un corps. Ça alors.

Ce que dis la 4ème de couverture :
« Je veux écrire le journal de mon corps parce que tout le monde parle d’autre chose. »
« De 13 à 87 ans, âge de sa mort, le narrateur a tenu le journal de son corps. Nous qui nous sentons parfois si seuls dans le nôtre nous découvrons peu à peu que ce jardin secret est un territoire commun. Tout ce que nous taisions est là, noir sur blanc, et ce qui nous faisait si peur devient souvent matière à rire. »

Et pour sûr, vous en rirez. Car les impressions, sentiments, douleurs que vous fait ressentir votre corps sont mieux que jamais décrites dans cet ouvrage juste et joliment écrit. Sous la forme d’un journal intime, il n’est cependant pas autobiographique. L’auteur a écouté, imaginé, fantasmé sur son corps. Voici ce qu’il en ressort.

« 41 ans, 7 mois, 25 jours – Vendredi 4 juin 1965
Les testicules peuvent s’étrangler de peur pour les autres, je l’ai déjà observé à Étretat quand Mona me flanquait le vertige en s’approchant trop près du bord des falaises. Ils m’ont rappelé cette aptitude à l’empathie ce matin, quand j’ai vu un cycliste se faire renverser par un taxi. Résultat, le choc, un vol plané, un jambe cassée, deux ou trois côtes enfoncées par le rebord du trottoir, le cuir chevelu largement entamé, la joue râpée, et mes couilles qui s’étranglent pendant le vol plané. Il ne pouvait s’agir que d’une peur empathique puisque, après tout, ce n’était pas sur moi que le pauvre garçon tombait. J’en conclus à l’altruisme des couilles, capables de craindre pour la vie d’autrui. Testicules siège de l’âme ? »

« 56 ans, 9 mois, 27 jours – Mercredi 6 août 1980
Blague entendue tout à l’heure, au bar où je prenais un café, racontée par mon voisin de comptoir, qui lui n’en était pas à son premier pastis : Pas de femmes, dit le médecin à son patient. Pas de femmes, pas de café, pas de tabac, pas d’alcool. Et avec ça, je vivrai plus vieux ? Je n’en sais rien, dit le médecin, mais le temps vous paraîtra plus long. »

« 74 ans, 4 mois, 15 jours – Mercredi 25 février 1998
Dîner chez les V. Le goût effroyable d’une bouchée manque me la faire recracher dans mon assiette. J’en suis empêché par la conversation particulière que le maître de maison entretient avec moi. J’avale donc tout rond, sans analyse préalable. C’est alors que mon interlocuteur recrache bruyamment sa propre bouchée en s’écriant : Mais chérie, quelle horreur ! Chérie confirme : les coquilles Saint-Jacques sont pourries. »

Un brin hypocondriaque, symptômes en quantité (polypes, hémorragies, anémie, zona, opérations). Tout est décrit dans les moindres détails et c’est d’autant plus vrai qu’on en rigole. De s’y croire, de se souvenir de nos histoires de corps. Quelle aventure.

 

Journal d’un corps
De Daniel Pennac
Éditions Gallimard
Prix : 22 €
Disponible, entre autres, ici